Route 12 et Bryce Canyon

 Mercredi 30 décembre 2015 : 

Comme en hiver (pas seulement en hiver d’ailleurs !) il n’y a pas grand-chose à faire le soir dans les petites villes de l’ouest américain comme Hanksville, nous nous couchons de bonne heure et nous sommes donc réveillés très tôt le matin. L’avantage c’est que l’on peut donc profiter pleinement de nos journées. Ce matin ne déroge pas à la règle, nous sommes réveillés bien avant le lever du jour. Deux possibilités s'offrent à nous : faire une troisième tentative de lever de soleil à Factory Butte ou prendre la route. Comme nous avons pas mal de kilomètres à faire aujourd'hui, nous optons pour la seconde solution.

Nous levons le camp vers 6 heures pour nous rendre au parc national de Bryce Canyon situé à environ 260 kilomètres. Ce sera notre cinquième visite dans ce parc magnifique dont nous ne nous lassons toujours pas. Quand on aime, on ne compte pas, et comme nous adorons, pourquoi s’en priver !

L'atmosphère s'est réchauffée par rapport à ces derniers jours : il ne fait que moins sept degrés. La station-service de Hanksville étant fermée, nous attendrons Torrey, la grande ville des environs (179 habitants en 2013), pour faire le plein. Après une petite heure de route nous y arrivons et constatons qu’ici aussi la station-service est fermée et qu’elle n’ouvre qu’à 9h30. Sur notre route nous sommes certains de trouver de l’essence à Escalante à une grosse centaine de kilomètres de là, mais ce sera très limite avec ce qu’il nous reste. Il y a bien la bourgade microscopique de Boulder, mais nous ne nous rappelons pas y avoir vu une station. Comme nous n’avons pas l’intention de perdre bêtement deux heures et demie, nous décidons de courir le risque.

Nous attaquons la route 12, réputée être une des plus belles routes de l’ouest des Etats-Unis, à un rythme de sénateur afin d’économiser quelques gouttes de carburant. La première partie qui est une très longue montée nous inquiète fortement : le compteur qui indique les miles restant à parcourir avec le peu d’essence qu’il nous reste diminue à un rythme effrayant. Il y a autre chose qui diminue au fur et à mesure que nous avançons sur cette route qui doit nous mener jusqu'à 2 930 m d'altitude, c’est la température extérieure. Moins dix degrés, moins quinze degrés, nous atteignons même pour la première fois la barre du zéro degré Fahrenheit, soit moins dix-huit degrés Celsius. Et cela continue encore de baisser. Nous entrons dans le domaine des températures négatives en degrés Fahrenheit jusqu’à atteindre moins quatre degrés Fahrenheit ou moins vingt degrés Celsius !

Heureusement le soleil commence à pointer le bout de son nez. Les températures ne vont pas tarder à remonter. Mais le premier effet du soleil, c’est de nous offrir un superbe spectacle.






Sur le parking où nous assistons au lever du soleil nous faisons la connaissance d’un trentenaire américain qui vient de passer la nuit ici, dans sa voiture. Il est tranquillement en train de boire son café en profitant comme nous du spectacle. Un peu intrigués, nous échangeons quelques mots avec lui et il nous explique qu’il n’a pas eu froid grâce à sa couverture et que cela lui permet d’économiser quelques dizaines de dollars quand il voyage … Respect !

Maintenant qu’il fait jour nous pouvons profitons des paysages de hauts-plateaux enneigés que nous traversons.


Nous atteignons Boulder avec une boule au ventre car l’ordinateur de bord nous indique qu’il ne nous reste plus que de quoi parcourir 30 miles, la distance exacte qui nous sépare d’Escalante. Au cœur de cette petite agglomération, nous repérons sur la gauche de la route une pompe devant une petite maison en bois. Est-elle toujours en fonctionnement ? Nous ne sommes pas encore arrêtés qu’une charmante grand-mère vient nous accueillir. Ouf ! Sauvés ! Et en plus l’essence est beaucoup moins chère que ce que nous avons payé ces derniers jours. Nous repartons soulagés, le réservoir plein à ras-bord. Nous ne saurons jamais si nous avions assez d’essence pour rejoindre Escalante …

Au-delà de Boulder la neige disparaît quasiment et nous retrouvons des paysages plus classiques pour l'ouest américain.



Avant d’arriver à Escalante nous faisons une petite halte pour rendre visite à quelques hoodoos et quasi-hoodoos.






Ceux qui connaissent bien la région devraient repérer assez facilement les lieux grâce à cette photo.


Avant de reprendre notre route, nous faisons un petit détour sur une piste où nous avons repéré il y a quelques années une jolie butte rocheuse bicolore. Etant donné l'orientation du soleil, elle devrait être plutôt à son avantage. Bien vu, c’est le cas …



Promis, avant de la rendre, nous lui ferons une petite beauté !


Encore un peu de route avant d'arriver à Bryce Canyon et un dernier arrêt au bord de la rivière Paria. C'est pour nous très étonnant de voir cette rivière entièrement gelée. Habituellement, lorsque nous la côtoyons, il règne une chaleur d'enfer.



En fin de matinée, lorsque nous arrivons au parc national de Bryce Canyon, nous sommes rassurés : la neige est bien présente.




Nous ne sommes jamais descendus dans l'amphithéâtre de Bryce (de loin la meilleure façon de découvrir ce parc sublime) avec la neige. C'est donc une occasion à ne pas manquer. Après un petit casse-croûte nous partons faire la randonnée classique qui associe Queens Garden trail et Navajo Loop trail.




Bryce Canyon est un parc que nous adorons, mais là, avec la neige et la douce lumière d'hiver, c'est encore mieux que d’habitude. Les couleurs sont plus douces, plus délicates, avec plus de nuances … tout simplement extraordinaires. Et randonner sans souffrir de la chaleur, quel plaisir !











Au deux tiers de notre randonnée le soleil est chassé par les nuages et honnêtement les paysages sont tout de suite moins intéressants. Heureusement, nous avons fait la plus belle partie de la randonnée sous le soleil. La dernière montée, plutôt escarpée, se fait totalement à l’ombre et à cet endroit, nous ressentons bien le froid qui est fortement accentué par le vent qui s’engouffre entre les falaises.



Lorsque nous rejoignons le bord de l’amphithéâtre nous profitons à nouveau de quelques rayons de soleil (ce seront les derniers de la journée) mais avec un ciel complètement gris.







Comme le ciel semble bouché pour un bon moment et que les prévisions sur Bryce Canyon ne sont pas très optimistes pour demain, nous décidons de ne pas rester ici ce soir et de poursuivre notre route. Direction Kanab, à 120 kilomètres de là, la première destination de notre séjour après notre arrivée à Las Vegas. La boucle est bouclée, cela sent la fin. Plus que trois jours !


Leprechaun canyon et Arsenic arch


Mardi 29 décembre 2015 (partie 2) 

La sortie de cette première section étroite marque l’endroit où le Leprechaun canyon devient vraiment profond (de l’ordre de 30 à 40 mètres).


Après s’être approfondi le canyon commence à se rétrécir à nouveau …





… pour se transformer en un véritable slot canyon (canyon à fente).





Personnellement nous n’avons jamais rencontré un canyon qui justifie mieux l’appellation de canyon à fente que le Leprechaun canyon, à part peut-être en Australie dans le parc de Bungles Bungles. La fissure dans laquelle nous évoluons est longue, très haute et possède une géométrie quasi parfaite. Elle est d’ailleurs tout juste assez large pour que nous puissions y avancer de quelques dizaines de mètres (100 à 200 mètres peut-être) et notre exploration se termine lorsqu’un équipement de canyoning devient nécessaire pour progresser plus avant. Inutile de dire que la dernière partie de la randonnée que nous venons de faire est fortement déconseillée aux personnes sujettes à la claustrophobie.

Puisque nous avons atteint la partie du canyon qui devient inaccessible aux randonneurs classiques, il est temps pour nous de faire demi-tour. Sur le chemin du retour nous nous arrêtons dans un secteur où nous avions décelé un potentiel photographique intéressant à l’aller et c’est vrai que cela rend plutôt pas mal !




Le soleil est maintenant plus aligné avec le canyon que lorsque nous sommes arrivés et nous ne pouvons pas nous empêcher de faire encore quelques photos avant de rejoindre notre voiture.




Certaines scènes du film « 127 heures » ont été tournées dans le Leprechaun canyon. Ce film raconte l’histoire vraie d'Aron Ralston qui s’est déroulée en avril 2003. Ralston, en descendant dans un slot canyon (le Blue John canyon), s'appuie sur une roche instable qui bascule sous son poids. Le rocher l’entraine dans sa chute et il se retrouve le bras droit coincé entre la paroi du canyon et le rocher. Après six jours et cinq nuits à essayer sans succès de se dégager, complètement déshydraté, en manque de nourriture et souffrant d'hypothermie, Ralston prend une décision extrême qui lui sauvera la vie : s’amputer de la main droite !

Nous quittons ce canyon qui est un véritable paradis pour les photographes et après quelques dizaines de mètres de route nous repérons une tache de couleur qui nous laisse bouche bée de surprise. Dans le canyon parallèle au Leprechaun canyon nous découvrons une petite tente orange à demi camouflée parmi la végétation. Nous n'en croyons pas nos yeux. A cette époque de l'année on trouve encore des courageux qui campent ! Pour ceux qui l'auraient oublié, ce matin, juste avant le lever du soleil, il faisait moins quinze degrés ! Dire que nous nous sommes gelés lorsque nous avons passé la nuit dans notre voiture à White Pocket alors qu'il ne faisait qu'à peine zéro degré ...

Il est temps maintenant de nous diriger vers notre prochaine destination : Arsenic arch, une petite arche rarement visitée. Et pour cause, la randonnée qui y conduit n'est pas très longue mais nécessite de se diriger avec carte et GPS car il n'existe aucun sentier et, difficulté supplémentaire, il faut s'affranchir de deux passages exposés qui peuvent venir à bout de la motivation des personnes sujettes à la peur du vide.


Après avoir négocié le premier passage « scabreux » nous poursuivons notre randonnée dans un joli décor minéral …


… et arrivons rapidement sur le deuxième passage qui peut être intimidant : un side-canyon (canyon secondaire) qu’il faut contourner par la droite et où par endroit le passage entre la falaise et le vide ne fait pas plus d’une trentaine de centimètres de large. Ce side-canyon nous offre une première vue sur Arsenic arch qui d’ici semble minuscule.


Arsenic arch mérite bien quelques efforts car sa localisation au bord d'un large canyon, sa silhouette gracieuse et sa forme inhabituelle en font une destination digne d'intérêt.





En fin de journée les nuages font leur apparition. Chouette cela nous donne des raisons d’espérer pour le coucher du soleil !


Effectivement, juste avant d’arriver à Hanksville nous nous arrêtons sur le bord de la route pour profiter du coucher du soleil qui enflamme les nuages.








A Hanksville nous dînons (hamburger) à nouveau dans même station-service qu'hier soir. Si nous voulons manger nous n'avons pas le choix ... Nous sommes seuls dans le bâtiment restauration de la station-service et aussi incroyable que cela puisse paraître, le serveur sera la seule personne que nous aurons croisé durant toute cette longue journée !

Quelle belle journée ! Nous avons découvert trois sites que nous ne connaissions pas, et une fois encore, au risque de nous répéter à nouveau, nous avons trouvé chacun de ces sites encore plus intéressants que ce à quoi nous nous attendions. C'est sûr, l'ouest des Etats-Unis recèle encore une multitude de coins extraordinaires qui n'attendent que notre visite.